L'autre jour, alors que j'attendais patiemment chez mon ophtalmeau, j'eus l'agréable surprise de constater que la pile de journaux était récente et que je n'allais pas lire les actualités du 28 août 2005. Prenant le premier se présentant, je me mis à lire l'éditorial du Point par Claude Imbert. Il y parlait des émeutes de la faim. Soit. Mais pour accentuer son propos - et aussi sans-doute par idéologie - il se mis à faire une comparaison qui ne pouvait laisser insensible " Ces pauvres-là n'ont pas, comme nos assistés, la bouche pleine pour crier dans les rues leur énième rouspétance. " Mes petites neurones se sont alors mis en surchauffe et m'ont fait voyager dans les lieux improbables de ma conscience. Car d'une certaine manière, Claude Imbert a raison, le combat n'est pas le même. Mais c'est la façon dont il présente les choses qui paraît choquante, et par delà la fond qu'il veut faire passer. Car s'il est vrai, que les premières victimes des économistes et spéculateurs fous qui dirigent la planète sont ces émeutiers de la faim, que notre sort est ô combien plus enviable que le leur, les combats menés en France en sont-ils moins légitimes ? Ma réponse est non. Certes, si on regarde notre situation et la misère d'en face, il n'y a pas lieu de se plaindre. Sauf que, pour se battre, ces "émeutiers" ont le besoin vital de regarder vers le haut. Or vers le haut, c'est nous. Alors désormais, lorsque nous nous battons pour sauvegarder notre université par exemple, nous battons aussi pour garder et nourrir l'espoir de ces populations. Pour reprendre l'image de Camus, si l'humanité était faîte de 6 milliards de Sisyphe, il paraîtrait normal de pousser son rocher sans jamais se poser de question. Du moment qu'un est libéré de ce fardeau, l'espoir naît chez les autres de pouvoir eux aussi s'en défaire. C'est un effet de mimétisme qui, s'il a si souvent nourrit l'autodestruction de l'humanité peut aussi participer à sa construction.